Vélo solo, ma première expérience !

Récit de l’aventure solo à vélo de Manon Morel, stagiaire de l’association.

Jour 1 :

“Des ailes me poussent”

Je suis partie seule sur mon vélo depuis mon domicile à Tassin-la-Demi-Lune en ce weekend de l’ascension. Objectif : rejoindre Chalon-sur-Saône en trois jours. J’ai pas mal hésité avant de partir. L’année dernière j’ai expérimenté pour la première fois le voyage à vélo (un peu plus de 300km) sur la ViaRhôna, mais je n’étais pas seule. J’étais même la suiveuse donc en totale confiance.

Alors seule, vais-je y arriver ?

J’ai, presque scolairement, préparé mes baluchons la veille du départ. Encore, la question d’être seule vient se heurter à mes craintes, notamment à cause du poids. Cette fois-ci, impossible de répartir les affaires sur plusieurs vélos. Tout ce que je prends en partant, je vais devoir l’assumer.

Sans aucun doute, je suis partie avec trop d’habits… Niveau couchage, j’ai fort heureusement une tente spéciale trekking qui pèse seulement 2 kilos, un matelas mousse (qui fera de mes nuits la bête noire de mon trip) et un duvet premier prix, plutôt chaud mais absolument énorme. Lorsque je regarde mon vélo au départ, je lui donne des airs de dromadaire avec sa grosse bosse à l’arrière, à croire que je pars pour un tour de France.

Pour ma première étape je visais un camping situé à 50 kilomètres le long de la Voie Bleue. Alors que j’avais un bon rythme, je me retrouve sur un chemin caillouteux, parfois accidenté, obligée de vérifier si je suis bien sur la bonne route. Ce que je croyais n’être d’une anecdote s’est révélé être en fin de compte l’itinéraire principal pendant une bonne 40ène de kilomètres (répartis sur 2 jours). Ce n’est pas l’idée que je me faisais de cette Voie Bleue, pourtant promue sur les réseaux sociaux.

Avec le poids des affaires, mes genoux un peu rouillés et ce revêtement, j’avais hâte d’arriver à mon 1er camping. En arrivant devant… surprise ! Le camping est fermé ! OK je n’avais pas appelé avant de partir mais je les avais tous regardés sur internet et cette information n’était pas la plus visible. D’ailleurs, je n’ai pas été la seule à me faire avoir. Prochain camping à 12 kilomètres, 2% de voies aménagées. Horreur, malheur.

A ce moment-là, je suis partagée entre la « joie » de vivre des moments imprévus et le désespoir de devoir affronter encore ces gros cailloux. Moi qui voulais de l’aventure, je suis servie.

Pendant plusieurs kilomètres je ne croise absolument personne. Je me remémore une étape sur la ViaRhôna en route pour Orange, sous 35 degrés, un No mans land. Cette fois-ci, je dois trouver la motivation en moi.

Gros moment de solitude en montant la tente pour la première fois au camping de Thoissey (Val de Saône). J’aurais dû me filmer, j’en aurais fait rire plus d’un, moi y compris évidemment. Le soir je me pose, je bois un coup. Je discute avec un autre voyageur très sympa, il me parle de ses précédents voyages et son projet futur, nos chemins prennent des directions différentes. Je repère une famille avec deux enfants et un tas d’affaires.

La nuit est fraiche mais je me sens forte !

Jour 2 :

Le lendemain, le stress du départ de la première journée passé, je me sens super bien ! Je pédale, je pédale, je pédale. C’est la liberté !

Mais cette solitude du voyage me fait réfléchir, beaucoup. Je me dis qu’un an auparavant, les journées passaient vites et les kilomètres défilaient sous mes roues. Car nous étions deux et j’avais une “carotte” qui me motivait à me surpasser. Là, le long de la Saône, je n’ai plus de carotte. C’est moi et moi seule. Du coup je suis ma propre carotte.

Sauf que je ressemble plutôt à une betterave au vu de ma tenue complète rose fuchsia. Autant dire que s’il m’arrive un accident où je me fais renverser par une voiture, on ne pourra pas dire qu’on ne m’a pas vu. Avec ma tenue, même pas besoin de lumière dans la pénombre. D’ailleurs, je remarque qu’il y a souvent des insectes qui viennent voler à mes côtés, j’en ai même qui font un petit bout de chemin posés sur mes gants, pensant sûrement que je suis comestible. AH oui ! Car mes gants sont jaune fluo et mon casque est bleu. Un arc-en-ciel ! Aussi coloré que mes émotions le sont. Passant de la joie d’être seule à la tristesse d’une certaine nostalgie.

Dans les deux cas, je ne peux que constater que pédaler m’ouvre l’esprit et me connecte avec mon corps ! J’ai faim, j’ai soif, j’ai mal aux genoux, j’ai mal aux fesses. Pause.

Le revêtement est vraiment… compliqué, pour ne pas être vulgaire. Mais, kilomètre après kilomètre, je me rends compte que je suis de plus en plus à l’aise. J’ai cette impression d’avoir confiance en mon vélo et qu’il me fait confiance en retour. Alors que je craignais de crever un pneu sur un moindre cailloux, je me retrouve à pédaler hâtivement et à zigzaguer avec une confiance que je n’avais alors pas ressentie auparavant. Mon précèdent voyage étant sur une belle piste bien balisée et bien lisse de goudron, je ne m’étais pas vraiment penchée sur la question. Désormais, j’ai dompté ma bête.

Aussi, je redécouvre le plaisir de recroiser en chemin des voisins de camping. On se hèle, se fait des coucous, des pouêt-pouêt avec nos klaxons, comme si on se connaissait tous et qu’on était une grande famille. J’ai envie de parler à tout le monde… D’ailleurs on m’arrête plusieurs fois en chemin pour me demander d’où je viens et où je vais. Je me rends bien compte qu’il y a peu de femmes seules sur les routes et que certaines personnes me regardent d’un air intrigué, surtout dans les campings.

Au passage, je suis surprise de la modernité de certains campings. J’ai notamment découvert des douches avec un bouton digital qui lance un chronomètre régulant l’utilisation d’eau chaude. On est loin des campings de mon enfance, mais c’est appréciable. Ce qui est aussi appréciable, c’est ce café que je bois avec la famille aux deux enfants que je retrouve au camping de aux rives du soleil.

Pour en revenir à mes constatations du jour, je remarque que les femmes qui sont avec leurs conjoints, ne me disent pas souvent bonjour. Moi je dis bonjour à tout le monde, principe de base. Mais je croise souvent des couples où l’homme me répond volontiers mais pas la femme. Au début je me dis que j’hallucine, mais sur la totalité du trip, j’ai vraiment de quoi affirmer cette remarque. Où est passée la « solidarité » féminine ? Est-ce justement à cause d’un sentiment de « rivalité » féminine ? Ça me donne des envies d’études comportementales sur les Hommes à vélo. Bref, on l’aura compris, mon esprit divague en avançant.

Jour 3

Le troisième jour, j’ai une patate d’enfer ! Dès que je remonte sur mon vélo, je me sens bien et j’ai hâte d’avancer. Dommage que la nature et ses lois en décident autrement. J’ai donc le plaisir de goûter au vent du nord et ses rafales à 45 km/h. Le genre de détail qui passerait inaperçu dans ma vie quotidienne, mais qui ce jour-là, a mis les nerfs à rude épreuve. En gros, pour un kilomètre pédalé j’avais l’impression d’en faire le double.

Bizarrement, alors que j’avance tout doucement et que le vent souffle, je regarde le fleuve que je trouve plus calme que jamais. A certains moments, on dirait un lac. Un gros serpent bleu, paisible, longé par des prairies verdoyantes, des vaches, des chevaux, des pécheurs… Ce qui me donne de la force, ce sont tous ces éléments de la nature. J’y suis très sensible. J’assiste notamment à un véritable festival de chants d’oiseaux. Un pur bonheur !

J’arrive à destination, je profite de ma soirée dans la ville puis je dors. Le lendemain matin, je rentre en train. Total : 174kms, je suis heureuse et fière de moi. Ce fût rapide ! Et dire que j’ai failli ne pas partir de peur d’être seule, alors que c’était en fin de compte la meilleure chose qu’il pouvait m’arriver pour me rebooster. Je regrette même de ne pas avoir plus de jours disponibles devant moi car j’aurais aimé pouvoir avancer encore et encore.

Finalement, je trouve que partir à vélo, c’est se rencontrer soi.

Alors j’ai hâte de me rencontrer de nouveau !

Par Manon Morel

2 commentaires sur “Vélo solo, ma première expérience !”

  1. Bravo Manon pour ce joli récit et d’être allée au bout de ton envie de partir seule en vélo 🙂

    1. Merci Betty !

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